Quand on disait à nos amis qu’on allait partir en vacances au Havre, les réactions allaient de l’incrédulité à la stupéfaction… Et pourtant ces vacances en août 2016 resteront parmi nos meilleurs souvenirs !
Le Havre ? Quelle drôle d’idée ! Qu’allez vous donc chercher là-bas ?
Des joyaux d’architecture moderniste du XXème siècle, évidemment. Un haut lieu de l’histoire et de l’urbanisme, bien sûr. Mais aussi et surtout un certain état d’esprit, une ambiance unique : un sens de l’accueil convivial et simple dans un décor à la fois dépaysant et évocateur. Des airs de port scandinave, d’ébauche de ville américaine mid-century avec une monumentalité quasi soviétique et une touche du modernisme épuré à la Brasilia…
Nous avons au départ été attirés par Le Havre parce qu’il constitue l’un des plus grands ensembles urbains des années cinquante. Son classement sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en 2005 a permis de changer le regard qui était porté sur ce centre-ville entièrement reconstruit entre 1946 et 1964, après sa destruction totale par les alliés à la fin de la seconde guerre mondiale. Cet espace de 133 hectares représentant selon l’UNESCO « un exemple exceptionnel de l’architecture et de l’urbanisme de l’après-guerre » est un des rares sites contemporains inscrits sur le patrimoine mondial de l’humanité.
Nous avons été comblés par notre immersion dans des lieux inchangés depuis les années cinquante. Nous avons été subjugués par l’ambiance unique, par les matériaux bruts et beaux (oui le béton peut être chaleureux et lumineux !), par la forte impression d’harmonie, et par la qualité de la lumière omniprésente. Le Havre, c’est une machine à remonter le temps, et mieux encore : c’est un manifeste d’utopie urbaine grandeur réelle. C’est un phénix qui renaît de ses cendres, et qui encore aujourd’hui se réinvente continuellement par l’architecture et le design.
Nous avons donc commencé par marcher dans les pas d’Auguste Perret, l’architecte en chef de la reconstruction, en tentant de comprendre les principes d’une opération urbaine aussi rapide, globale, vaste, harmonieuse, démocratique et altruiste.
Il nous fallait donc d’abord trouver le bon hébergement.
L’hôtel Ibis Style Le Havre centre Auguste Perret mérite bien son nom. Il semble ne pas avoir changé depuis la reconstruction. Il présente l’avantage d’un excellent emplacement central, rue de Paris, et de prestations d’époque pleines de charme : le décor de ses chambres, et surtout de sa magnifique salle du petit-déjeuner, nous ont plongés dans les 50’s. Les espaces sont beaux et de grandes proportions. Les balcons, terrasses et baies vitrées ménagent de belles vues sur la ville. On se croirait dans une reconstitution historique. Mais n’attendez pas trop des salles de bain : elles aussi sont d’époque…
Le préalable incontournable lors d’un séjour au Havre passe par la visite guidée de l’appartement témoin Perret. Notre guide nous a d’abord dépeint le contexte historique de la destruction de la ville, et le projet de reconstruction confié par l’Etat à l’architecte Auguste Perret, qui avait alors 70 ans et qui était le meilleur expert du béton armé. Il nous a présenté in situ les principes régulateurs de l’architecture définie par l’atelier Perret : la structure poteau-poutre, le module unitaire de 6,24 m qui est la portée optimale de la poutre en béton armé et qui crée l’harmonie entre tous les bâtiments de la ville. Puis nous avons découvert l’appartement modèle, qui reconstitue un logement familial de 1950 bénéficiant des équipements modernes.
Les proportions de l’architecture de Perret sont généreuses et rationnelles. Elles sont structurées et ordonnées selon des rythmes classiques hérités de l’antiquité et adaptés aux innovations techniques de l’époque.
La structure porteuse reste apparente en façade. La technique n’est pas masquée, c’est sa régularité et sa géométrie qui constitue le décor urbain. Les matériaux sont bruts, sans artifice ni parement superflu, mais les différents traitements de surface du béton et l’utilisation de graviers variés lui confèrent une grande beauté et une richesse de dessin : bouchardage, lavage, polissage, brut de décoffrage…
Perret a développé une vision altruiste et démocratique de l’architecture. Il veut apporter à tous le confort, le calme, l’espace, l’air et le soleil. Il a la conviction qu’une architecture pure et exigeante peut créer un cadre de vie meilleur pour tous, dans l’esprit du partage, de la rencontre, de l’échange. Son modèle de logements est destiné à tout les types de ménages, sans distinction de classe sociale.
Auguste Perret est un architecte humaniste qui a voulu offrir la beauté à tous, mais une forme de beauté essentielle, fonctionnelle et simple, débarrassée du superflu.
Nous avons ressenti une grande émotion en visitant ensuite son chef d’oeuvre : l’église St Joseph, achevée après sa mort en 1954, et dédiée aux victimes de la seconde guerre mondiale. De plan centré, elle est organisée autour de son clocher monumental qui est comme un phare au coeur de la ville. C’est le premier monument que l’on voit en arrivant par la mer.
A l’intérieur de l’église St Joseph, on est frappé par la lumière qui émane de la dentelle de béton, par la légèreté aérienne de la structure. On est happé par le vide du clocher, dont le béton semble suspendu dans les airs : il n’y a aucun pilier, la prouesse technique est immense et elle laisse place à la poésie. On est dans une fusée de science-fiction, ou dans un faisceau de lumières colorées. On perd le contact avec la réalité, on pourrait rester dans ce sanctuaire pendant des heures…
Après les éléments majeurs du Havre de Auguste Perret, il nous restait encore quantité de merveilles à découvrir… Nous avons passé trois jours à sillonner le Havre. Notre grande balade à travers la ville est cliquable sur le plan ci-dessous, pour localiser les différents centres d’intérêt. Lors de notre séjour en août 2016 le funiculaire était malheureusement hors de service pour sa révision annuelle, donc nous avons grimpé la côte à pieds…
Il s’agit d’une promenade d’une quinzaine de kilomètres qui passe par le centre-ville, le plateau de Sanvic, la plage et le quartier des Docks, que nous vous recommandons de fractionner en deux ou trois journées de façon à prendre le temps de visiter les différents sites, à découvrir dans les prochains billets…
C’est fou comme vous donnez envie de voyager vers les destinations les plus inattendues ! Merci pour ce partage.
Tellement ça, merci Emma de raconter si joliment ma ville ??
bin vraiment…cela ne m’etonne pas…on me parle tellement du changement du havre…que cela donne envie d’y aller…et cela se confirme…vraiment de bien belles photos….
J’aime le Havre. Je suis de Marseille et notre entourage nous a pris pour des fous quand on a dit que l’on partait vivre au Havre (c’était en 2006). Et j’y suis bien et même très bien. J’aime cette architecture, j’adore me perdre dans la nouvelle bibliothèque Niemeyer, j’apprécie la proximité de la mer, le paysage du haut des falaises, les visites régulières aux Jardins Suspendus.
Nous remarquions hier qu’il y avait de plus en plus de touristes au Havre :)
Merci pour ce beau reportage et ce partage.
Je ne pensais pas dire ça un jour mais tu me donnes drôlement envie d’aller visiter cette ville!
Merci pour ces belles images et aussi pour les commentaires ,vous avez fait une jolie vitrine pour notre ville !